AERON ET ORSAY

Les mains enfoncées dans les poches de mon manteau d’hiver, je me promenais totalement au hasard dans les rues de la ville, laissant mes pensées vagabonder là où elles voulaient, pendant que mon regard se déposait sur les passants et le peu de magasins encore ouverts. De temps à autre, un petit nuage blanc se formait devant ma bouche, preuve que je poussais des soupirs. Depuis que j’avais décidé d’échanger ma maison pour une durée indéterminée, je me demandais si cela était une bonne chose. Non que je ne fasse pas confiance à la personne qui prenait ma place dans mon chez moi, mais depuis ma sortie de prison je n’avais pas pris un seul jour de vacance et savoir que j’allais travailler moins me faisait un peu peur. Pourtant je sentais bien que mon corps me demandait de ralentir le rythme, qu’enchainer deux boulots durant la journée n’était pas une bonne idée, mais je ne pouvais pas m’en empêcher. Il fallait que je sois tout le temps active, tout le temps en mouvement. Etre resté un an à ne rien faire à part pensée, m’avait quasiment plongée en dépression. Je m’étais doc jurée d’être toujours active et ma promesse était en train de me tuer à petit feu. Je tournais à gauche, puis à droite, traversant différente route, ne sachant pas du tout où ma promenade nocturne allait se terminer. J’essayais vainement d’imaginer ma vie avec du temps pour moi, mais je n’y arrivais pas. J’avais beaucoup trop peur de retomber dans la dépression qui me guettait à chaque fois que je m’essayais ou me couchait. Les gens devaient très certainement me prendre pour une folle, mais c’était mon mode de vie que cela leur plaise ou non. Je ne prenais jamais de vacances, même pendant Noël, Nouvel An ou toutes autres fêtes je travaillais. Soit en tant que photographes pour des soirées, soit dans mon bureau, penché sur des tonnes de feuilles à essayer d’imaginer ma prochaine collection. Plus d’une personne avait essayé de me faire décrocher, mais personne n’y était arrivé. Ils abandonnaient les uns après les autres et je les comprenais tout à fait. Je ferais exactement la même chose si je me retrouvais devant un de mes sosies.

Je revins dans le présent seulement quand mon regard tomba sur le phare qui se trouvait en face de moi. Dommage que je n’aie pas pensé à prendre mon appareil photo, car avec la nuit qu’il y avait, les clichés auraient pu être magnifiques. Poussant un nouveau soupir, j’enfonçais un peu plus mes mains dans ma veste et décidais de monter tout en haut de monument pour regarder la vue. Cela n’allait pas m’occuper longtemps, mais au moins j’aurais l’impression, durant quelques minutes d’être dans un autre monde. Un monde de silence où rien n’y personne pouvait venir me déranger. Dès que je fus à l’intérieur du bâtiment, je sentis la chaleur envahir mon corps, ce qui me fit légèrement sourire. J’avais été tellement déconnectée dans les rues de la ville, que je n’avais même pas remarqué que je grelottais de froid. Pourtant avant de sortir j’avais mis de bons vêtements chauds, mais cela n’avait pas suffit à ce que mon corps reste à la bonne température. Lentement, écoutant le moindre bruit qui m’entourait, je gravissais les marches en pierre, me demandant si quelqu’un avait eu la même idée que moi. Mais vu le froid qu’il faisait, la plupart des habitants de la ville devaient être bien au chaud chez eux à regarder la télévision, à lire ou même à rigoler entre amis. En seulement quelques minutes, j’arrivais au sommet et en voyant la grande lumières tourner sur elle-même, un nouveau sourire apparu sur mes lèvres. Plus d’une fois j’avais pensé que la lumière d’un phare était un peu comme moi. C’était quelque chose qui ne pouvait pas rester en place une seule seconde, ayant toujours besoin d’aider les autres à se repérer. Voulant déjà me réchauffer totalement avant d’affronter une nouvelle fois le froid, je restais derrière la grande baie vitrée, déposant mon regard sur l’océan et me perdant une nouvelle fois mes pensées.

AERON ET ORSAY

Droite comme un i et le regard perdue dans le vague, j’attendais que les minutes voir même les heures passent. Que je sois ici ou chez moi, cela ne changeait pas grand-chose, le temps passait à la même vitesse. De temps à autre, un petit soupir s’échappa d’entre mes lèvres, ce qui me ramenait à moitié dans la réalité. J’avais l’impression d’être totalement seule au monde, comme souvent quand je prenais des photos. Pourtant cette fois-ci je n’avais pas mon appareil sur moi et pourtant je me retrouvais dans le même monde. Heureusement pour moi, j’aimais la solitude, enfin non … Je ne l’aimais pas vraiment, mais depuis toute petite j’avais pris l’habitude d’être toute seule. J’avais pourtant deux frères et une meilleure amie qui était tout le temps avec moi, mais même avec toutes ses présences j’avais toujours eu l’impression d’être toute seule, de vivre dans un monde différent du leur. Peut-être est-ce que j’avais cette impression parce que j’avais grandis sans mère et que le vide qu’elle représentait était mon monde. Secouant légèrement ma tête, j’essayais de chasser tout ses souvenirs qui me revenaient en mémoire. Cela faisait plusieurs mois que je n’avais pas pensée à mon enfance et mon adolescence, je ne comprenais donc pas pourquoi tout un coup tout me revenait en tête. Mais il y avait des soirs comme ça où un rien nous faisait devenir nostalgique. Je l’étais rarement, mais quand je le devenais, c’était surprenant, car je changeais plutôt rapidement d’humeur et quand mes amis ne le savaient pas, ils pensaient que j’avais mes amis du mois ou même pire, que j’étais tombée enceinte. En pensant à tout les commentaires et toutes les idées plus farfelues les unes que les autres, un petit sourire en coin apparu lentement sur mon visage et j’eu même envie de rire.

Tellement plongée dans mes pensées, qu’un tremblement de terre aurait pu se produire, que je n’aurais rien sentie. J’aimais être dans mon monde, car rien n’y personne ne pouvait m’atteindre. Je me sentais bien, en sécurité. Se fut donc pour cela qu’en sentant des bras entouré mon corps, je sursautais légèrement, mais je compris bien vite qui se trouvait derrière moi. De toutes les personnes que je connaissais, il n’y avait qu’Aeron qui m’entourait comme ça de ses bras. Tournant légèrement la tête, je remarquais que son chien était également présent, bien sagement couché en train de nous regarder. Et bien, je savais que quand je me trouvais dans mon monde je n’entendais plus rien, mais de là à ne pas voir mon meilleur ami et son chier arriver, je ne le pensais pas. Il faudrait donc que je méfie, car j’avais tendance à partir dans mon univers un peu partout. Il ne fallut que quelque secondes avant que la voix du jeune homme retentisse dans le silence qui c’était installé entre nous. Rapidement, mes lèvres se déposèrent sur la joue qui se trouvait la plus proche de moi et mes mains se déposèrent sur ses bras, pendant que je me blottissais tout tranquillement dans ses bras. En sentant chaleur corporelle contre moi, un doux sourire apparu alors sur mes lèvres.

« Bonsoir mister Backer. Je vais très bien et toi ?? Je ne m’attendais pas à te voir ici. »

Bien entendu je n’allais pas lui dire de partir, j’étais bien trop contente de le voir et de plus l’endroit était public, donc tout le monde avait le droit d’y venir. Il ne me fallut que quelques secondes pour tourner sur moi-même et déposer mon regard dans le sien. Mon sourire était toujours présent sur mon visage et je me doutais un peu voir même beaucoup que tant que je serais en compagnie du jeune homme il resterait en place. Depuis ma sortie de prison, c’était très certainement l’une des plus merveilleuses rencontre que j’avais fais. Je savais que je pouvais toujours compter sur lui et bien entendu, c’était pareil de mon côté. Quoiqu’il lui arrive, je serais toujours présente. Mes bras allèrent bien vite entourer son cou et après l’avoir observé pensant quelques secondes, je redéposais mon regard dans le sien.

« Et bien alors, qu’est-ce qui c’est passé d’intéressant dans ta vie depuis notre dernière rencontre ?? »